SERAFIN PH : réforme de la tarification des établissements pour personnes handicapées

Une réforme majeure des modalités de tarification des établissements et services médico-sociaux est en cours. Elle porte le nom de code de SERAFIN PH[1]. Le but est d’adapter les établissements aux besoins des usagers. Evolution des réponses vers plus de souplesse, meilleur ajustement aux réalités des personnes accueillies, facilitation des parcours : ces objectifs supposent une refonte de la tarification perçue comme trop rigide et inadéquate.

L’intelligence de cette réforme réside dans sa construction : le ministère a concédé la nécessité de prendre le temps, d’associer les acteurs (via le groupe technique national), de tester les solutions envisagées. Très vite, les travaux engagés ont dépassé le strict cadre de la tarification pour interroger les attentes des parties prenantes sur les formes d’organisations, les fonctionnements, les empêchements aux transformations, etc.[2].

La philosophie de la réforme envisagée consiste, d’une part, à identifier les besoins des personnes accueillies, et, d’autre part, de faire correspondre à ceux-ci des prestations. Pour cela, deux nomenclatures ont été construites (besoins / prestations)[3]. La seconde se divisant elle-même entre les prestations directes de soin et d’accompagnement et les prestations indirectes liées au pilotage des dispositifs et aux fonctions support. C’est une démarche fondée sur une observation méthodique des réalités que vivent les établissements et services médico-sociaux, notamment en termes d’inadéquations, d’anomalies, de distorsions ou d’inégalités de traitements mais aussi de coûts.

Mais nous craignons que l’idée généreuse du départ ne se dégrade à terme en une procédure pointilliste et obsessionnelle de découpage du réel en petites cases dans lesquelles devront entrer, de gré ou de force, toutes les situations, en catégories qui stigmatiseront un peu plus les usagers, en normes qui contraindront définitivement les pratiques[4].

Avons-nous vraiment besoin d’une action sociale et médico-sociale où tout est rationnalisé, formalisé, normalisé, standardisé ? Sont-ce là les conditions de la créativité des acteurs de terrain ?

Plutôt que de vouloir maîtriser le vivant en indexant exhaustivement les situations – comme si elles pouvaient être toutes envisagées – ne faudrait-il pas mieux créer les espaces d’innovation qui permettraient d’inventer de nouvelles réponses, des formes d’accompagnement inédites, une clinique médico-sociale originale ? La tarification qui supporterait cette démarche créative serait la résultante des expérimentations. SERAPHIN PH ne fait-il pas fausse route en posant la question de l’innovation à partir de la tarification ?