RSA et bénévolat ? la remise en cause du principe de redistribution

Le tribunal administratif de Strasbourg a déclaré illégale une disposition du département du Haut-Rhin qui voulait contraindre les bénéficiaires du RSA à effectuer des heures de bénévolat dans des associations. Le président du Conseil Départemental ne lâche pas pour autant. Il indique sur France-Inter qu’en cas de refus le versement du RSA pourrait quand même être revu…

S’il paraît judicieux d’inscrire le bénévolat dans le parcours d’insertion des personnes, le rendre obligatoire ou y conditionner le versement d’une aide n’est pas du même niveau et n’a pas les mêmes significations politiques.

L’engagement citoyen dans des associations concourant à l’intérêt général est une voie privilégiée pour reconstituer son capital social, œuvrer à sa reconnaissance sociale personnelle, tisser des liens de solidarité, s’inscrire dans les réseaux sociaux, se sentir utile. Proposer cette perspective dans un parcours d’insertion est une heureuse initiative si elle rencontre les appétences de la personne accompagnée.

Par contre, le rendre obligatoire, c’est revenir, insidieusement aux vieilles lunes du « workfare » qui oblige les bénéficiaires à « mériter » l’aide qui leur est apportée, voire à apporter une contrepartie à ce qu’ils reçoivent.

Sommes-nous en train de revenir aux temps des ateliers généraux de la fin du 19ème siècle ?

Cette question est à mettre en relation avec les mouvements actuels autour de l'accueil des réfugier (ou plutôt le refus d'accueil avec les manifestations qui accompagnent en certains lieux, l'accueil de 25 personnes dans des communes de 50000 habitants…..). Perte de la valeur de solidarité, égoïsme exacerbé, peur de l'autre, repli sur soi, montée de la  xénophobie, ne vont-ils pas avec le développement actuel  des discours politiques tournés vers le passé comme âge d'or perdu ?

 La façon de s’emparer de nos principes républicains de redistribution pour désigner comme cause des difficultés budgétaires les bénéficiaires des subsides de l’Etat,  marque une évolution de la démocratie vers une populocratie qui laisse croire que le peuple a toujours raison surtout quand il n'accède pas à une réflexion au-delà de son espace de respiration...

Il est toujours plus facile de d’exciter la haine et le rejet que d’expliquer la solidarité.

Il est temps que les travailleurs sociaux fassent entendre leur voix pour dénoncer ces fausses vérités livrées en pâture aux électeurs. Il est aussi de leur responsabilité de faire valoir l’importance de leur conception de la solidarité, de mettre en évidence la richesse de la redistribution pour l’ensemble du pays et de valoriser la considération de l’autre différent comme une chance et non comme une charge dont il faut se débarrasser.