Quelle police pour quelle société ? (ou que fait la police ?)

Après les attentats terroristes qui ont bouleversé la France, des manifestants embrassaient des policiers. Après l’interpellation musclée d’un jeune contre lequel des suspicions de viols ont été évoquées, des manifestants vilipendent la police. Dans les tourments de ces mouvements de l’opinion publique confrontée au meilleur et au pire, la question qui se pose, pour les professionnels du social, est : De quelle police a besoin la société ? Que peut dire le travail social sur cette question ? La réponse est complexe et ne peut être univoque.

Le glissement progressif des « gardiens de la paix » vers les « forces de l’ordre » depuis plusieurs années indique l’évolution des missions qui leurs sont confiées.

Les travailleurs sociaux s’appuient sur ces représentants de l’ordre quand il s’agit de protéger des personnes fragiles qu’ils accompagnent, ou afin de contenir des personnes  menaçantes, dangereuses ou réprimer les individus dangereux.

Ils font appel à la police pour ce que les éducateurs nomment le « rappel à la loi », c’est-à-dire pour signifier à des jeunes, parfois à des adultes, que l’impunité n’existe pas dans un État de droit.

Ils savent informer, avec discernement et dans le respect des principes de confidentialité ou de secret professionnel, les enquêteurs judiciaires pour éclairer des affaires qu’ils déclenchent parfois eux-mêmes en opérant des signalements auprès du parquet.

Ils vivent une réelle proximité avec les services de police ou de gendarmerie immergés dans les quartiers ou les territoires selon une complémentarité qui renforce un maillage social qui porte le souci des habitants.

L’efficacité de cette complémentarité nécessite le partage d’un respect réciproque des missions de chaque fonction et des personnes qui les représentent.

Mais ils sont parfois en franche opposition pour protéger des usagers où résister à des traitements inadéquats. Certains se retrouvent même poursuivis pour avoir défendu le respect de leur secret professionnel. D’autres travailleurs sociaux résistent soutenant le principe d’un accompagnement social qui refuse la normalisation des publics, le contrôle inquisiteur des comportements ou encore l’étiquetage systématique des marginaux.

Rien ne peut être simple dans les liens entre les représentants du travail social et ceux des forces de police. Ils sont tous deux nécessaires au fonctionnement social mais dans une différenciation des missions, des rôles et des places occupées par chaque fonction. C’est dans l’assurance d’une attitude digne et intègre de chaque professionnel dans l’exercice de sa mission qu’un partenariat efficace et bénéfique à tous pourra participer à un apaisement des tensions au cœur des cités. Il en va de la responsabilité de chacun pour que les seuls rapports de force ne représentent pas l’unique façon de vivre en société.