Que peut-on attendre de la parité dans les assemblées départementales ?

Les élections départementales ont permis la constitution d’assemblées exécutives où la parité femmes/hommes est arithmétiquement respectée. Cependant, seulement dix femmes ont été élues à la présidence de ces nouvelles entités sur 101 départements. Autant dire que le principe de parité engagé en mars a encore un long chemin à parcourir pour atteindre ses objectifs. Que peut-on attendre de cette évolution ?

Chacun sait que les règles sur la parité sont venues compenser l’échec d’une égalité entre tous les citoyens pensée selon un principe universel qui n’est jamais parvenu à corriger les inégalités de faits. Particulièrement dans le domaine politique, l’égalité des sexes est restée une intention pieuse. Si la loi s’est toujours située au-dessus des genres – les droits de l’Homme, comme les anges, n’ont pas de sexe – les pratiques ont toujours laissé toute la place à la domination masculine. Ce qui fait dire à certains que l’attrait pour le pouvoir est une affaire d’hommes.

Deux courants divergent quant aux raisons de promouvoir une égalité factuelle entre femmes et hommes. Les féministes différentialistes affirment qu’il existe une différence irréductible entre les genres (biologique, historique, culturelle…) qui justifie la parité comme moyen d’assurer une représentation proportionnelle de ce qui constitue l’humanité. Les féministes égalitaristes réfèrent plutôt le principe de parité à une mesure provisoire visant à corriger une inégalité de traitement liée à des discriminations contraires aux principes républicains. « Dans cette optique, la parité n’est pas une fin en soi mais un moyen de faire advenir concrètement la dimension universelle de la citoyenneté, et de mettre fin à l’hypocrisie d’un universalisme abstrait qui s’accommode de la sous-représentation des femmes dans les instances politiques.[1] »

Les différentialistes attendent que la parité absolue dans les nouvelles assemblées départementales apporte un peu plus de sensibilité féminine dans la gestion des départements. Cette évolution entraînerait une autre façon d’exercer le pouvoir grâce aux femmes. Cela reviendrait simplement à passer de « la main de velours dans un gant de fer » à « la main de fer dans un gant de velours », c’est-à-dire à régler des questions d’enrobage sans interroger les contenus du pouvoir.

Il s’agit plutôt – c’est du moins ce que nous pouvons espérer en référence au courant universaliste – d’un acte politique d’égalité concrète entre tous les citoyens. La parité n’amène pas les femmes au pouvoir, elle induit l’idée d’une forme différente de pouvoir, qui met réellement fin aux privilèges d’un sexe sur l’autre pour ouvrir à de nouvelles façons d’envisager la gestion des affaires publiques. Puissent les élections départementales initier ce mouvement !

 


[1] Danièle Lochak, Droits des femmes, droit universels, in « Hommes et Libertés », revue de la Ligue des Droits de l’Homme, n°167, septembre 2014