Petit parallèle interrogatif
Voilà plusieurs semaines que le débat sur la réforme du collège enflamme les médias, les politiques et ….les enseignants.
Rentrer dans le fond et la forme de ce débat a déjà fait l’objet de prises de positions de bien des éditorialistes, voire de polémistes. Le sujet de notre billet ne sera donc pas l’expression d’une certitude prenant partie pour tel ou tel avis, mais plutôt de proposer un petit parallèle interrogatif entre le débat actuel sur les conceptions de l’enseignement et notre secteur social et médico-social, à partir de deux points entendus lors des critiques formulées.
● L’inquiétude formulée lors de la manifestation des enseignants sur une certaine autonomie des collèges, avec la responsabilité accrue du principal sur l’organisation qui prendrait en compte les particularités des adolescents et du lieu d’implantation, notamment, s’avère inconcevable pour bon nombre d’entre eux.
Imaginons les structures sociales et médico-sociales déconnectées de tout projet.
Imaginons un instant des réunions regroupant l’ensemble des acteurs pour échanger sur les grandes lignes propres à l’institution (au sens d’appartenance à une communauté de pensée et d’action), les mises en actes des pratiques quotidiennes, sans direction qui en assure le fil rouge.
Imaginons l’absence d’une fonction de direction qui fasse à la fois référence du collectif et représentant de l’autorité. Cette fonction à la fois réelle et symbolique nécessaire à la construction, à la cohérence des actions et à la sérénité des différents professionnels représente bien sûr une subjectivité, par la personnalité du détenteur de la fonction, mais aussi la garantie d’une position représentant la dimension collective.
Cette construction de ce que d’aucuns appellent « la position d’exception », a certes, mis des années à se constituer et est d’ailleurs interrogée par la tendance plus gestionnaire que véritablement technique que prennent les contours des nouvelles orientations. Le secteur social et médico-social ne vient-il pas interpeller cette évolution qui tend à laisser chacun des professionnels face à ses propres compétences, sans « balises » institutionnelles ? Les évaluations internes et externes remplaceraient-elles ces interpellations constantes ? Qui assumerait la responsabilité globale et particulière des projets ?
● Il en va de même pour le travail interdisciplinaire. Imaginons, là encore le retour à des actions plus individuelles, édictées par la certitude des compétences de chacun, par l’énoncé de programmes précis et imposés, déconnectés de la particularité du quotidien et des individus.
La réflexion et les actions interdisciplinaires ont enrichi les réponses par le croisement des échanges, par la capacité de chacun à accepter la critique constructive des collègues, par les innovations particulièrement intéressantes qu’elles ont produites.
Chaque professionnel, par son histoire, sa formation, son métier, sa personnalité, ses sensibilités, détient une part de compétences mais aussi de limites. Dans le secteur social et médico-social l’éducateur n’est pas l’enseignant, de même que le médecin n’est pas le psychologue. Chaque particularité professionnelle est nécessaire à la réalisation du projet. C’est bien dans l’interdisciplinarité de réflexion et d’actions, construite au fil des années de réflexion que sont venus se constituer les adaptations constantes que réclament les évolutions des populations accueillies. L’enseignant de mathématique pourrait-il être confondu avec l’enseignant d’histoire ou par le professeur de gymnastique ? Cela empêche-t-il des actions communes ou un croisement de réflexions pédagogiques ?
Vous avez dit « parallèle » ?
Toute transformation vient bousculer des certitudes, mais aussi des conforts individuels. C’est cependant au travers de nouvelles contraintes que l’intelligence individuelle et collective puise pour construire des innovations productives de progrès. Cette dynamique ne va pas sans rupture, ni sans effort, sans hoquet de l’histoire, mais que serait l’homme sans sa capacité à toujours chercher à améliorer ses connaissances et ses expériences pour approfondir son mieux-être ?