L’État vole ses vieux et se repent !
La Contribution Additionnelle de Solidarité pour l’Autonomie (CASA) a été instituée, à titre exceptionnel pour 2013 et 2014, afin de financer le grand projet gouvernemental sur l’autonomie. Cette contribution est prélevée, à hauteur de 0,3 %, sur les pensions des retraités imposables. Charité bien ordonnée commençant toujours par soi-même, les vieux cotisent pour les vieux, rien de plus normal ! Les fonds collectés devaient servir de base au projet de loi sur l’autonomie sur lequel planche Michèle Delaunay. Le Président de la République a annoncé la publication du texte avant la fin 2013 lors du congrès de l’UNIOPSS en janvier dernier. Depuis, les choses semblent plus hésitantes. La ministre vient de confier une mission au comité « avancée en âge : prévention et qualité de vie », présidé par Jean-Pierre Aquino pour contribuer au volet « anticipation-prévention ». Le projet repose en effet sur trois « A » : Anticipation, Adaptation de la société au vieillissement, Accompagnement de la perte d’autonomie. Luc Broussy assurera une mission sur le second volet. Le troisième volet, quant à lui, semble suffisamment alimenté par les nombreux rapports produits ces derniers temps. De consultation en consultation, le projet avance lentement et l’échéance est maintenant fixée à fin 2014 !
Mais les fonds sont déjà collectés car la CASA s’est bien appliquée en 2013… Le gouvernement a donc décidé d’attribué les fonds de cette année au fonds de solidarité vieillesse qui a pour fonction de compenser les insuffisances de ressources des personnes âgées, pas la perte d’autonomie. La Fédération Nationale des Associations de Personnes Âgées et de leurs Familles (FNAPAEF) dénonçait ce vol : « On nous refait le coup de la vignette ! ».
Marche arrière ce 24 octobre par un amendement voté au Parlement dans le cadre des débats sur le Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale (PFLSS) : 100 millions d’euros seront bien affectés, en 2014, à la perte d’autonomie. Cette mesure est accueillie avec circonspection par les organisations représentantes du secteur (FHF, FEHAP…). Cette enveloppe servira-t-elle à financer l’Aide Personnalisée pour l’Autonomie (APA) à domicile ou la modernisation des Etablissements d’Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes (EHPAD) ?
Trois pas en avant, deux pas en arrière ! Qu’il s’agisse des échéances du législateur, de la collecte des fonds ou de leur destination, c’est l’hésitation qui semble dominer. Cela est-il le symptôme du malaise sociétal qui entoure la question cruciale de la dépendance ?
La perte d’autonomie, liée au grand âge, est un problème ingérable parce qu’il est au point de croisement de l’accroissement démographique des personnes âgées, de l’explosion des coûts liés à la prise en charge et de la raréfaction des moyens du fait d’une crise économique qui affecte les ressources de l’État et des collectivités territoriales.
Comment sortir de ce dilemme ? N’est-il pas urgent de dépasser le stade de « mesurettes » (0,3% par-ci, un plan grand âge qui n’atteint pas ses objectifs par-là…) pour engager une véritable politique qui reposerait, préalablement, sur un grand débat public engageant la solidarité de tous les acteurs économiques ? Pour cela, nous devons prendre au mot les ambitions affichées par notre ministre déléguée aux personnes âgées : adapter la société au vieillissement de la population.