Le pouvoir d’agir des collectivités territoriales

Nous avons l’habitude d’opposer le secteur privé non lucratif et les collectivités publiques. La raison de ce clivage réside dans le fait que les seconds disposent, seuls ou à plusieurs, du triple pouvoir de délivrer les autorisations, de fixer le tarif des prestations et de contrôler la bonne exécution des missions.

Cette tension est particulièrement sensible dans les relations des associations d’action sociale avec les départements car ces derniers, outre les prérogatives de « chef de file » qu’ils exercent, gèrent également des activités qui sont parfois concurrentielles avec les missions déléguées aux associations, mettant ces dernières sous pression.

Mais les départements sont, eux aussi, sous pression. La loi NOTRE (Nouvelle Organisation des Territoires de la République) est venu ajouter une charge de plus aux contraintes qui s’accumulent pour eux depuis la décentralisation. D’une part les coûts des réponses aux besoins ne cessent de croître alors que les ressources se crispent de plus en plus. En outre, le transfert de compétences toujours plus larges venant de l’État n’est pas compensé par le transfert équivalent des moyens budgétaires. Ces effets ciseaux portent directement atteinte au pouvoir d’agir des départements.

Ces collectivités territoriales étranglées ne sont plus en mesure de porter à son juste niveau l’animation d’une politique territoriale d’intervention sociale et de développement local. Là où de larges marges de manœuvre permettraient de nouer un partenariat confiant avec les associations pour promouvoir une politique locale active, les contraintes limitent les possibilités d’action. Le pire, est que ces contraintes se reproduisent mécaniquement dans les relations entre départements et associations d’action sociale. C’est ainsi que nous assistons impuissants à des réductions insensées de certains budgets, voire à leur suppression pure et simple, au refus d’un département d’honorer ses dettes aux associations, à des appels à projets sauvages qui déchainent des concurrences tout aussi sauvages, à des retraits d’autorisation improvisés, à des injonctions extrêmement directives, à des mises en demeure injustifiées, etc.

En lieu et place de ce climat détestable, ne convient-il pas d’affirmer que le secteur privé non lucratif et les collectivités publiques sont engagés dans un combat commun contre l’exclusion, partagent les mêmes valeurs de justice et de solidarité, coopèrent à la construction locale d’une société d’égalité et de fraternité ? Vu sous cet angle, le pouvoir d’agir des collectivités publiques est exactement proportionnel à celui des associations. Le développement du pouvoir d’agir des uns renforce celui des autres et réciproquement.