Chômeur = suspect !
Pôle emploi annonce le recrutement de 200 agents qui seront chargés de contrôler les fraudes commises par les demandeurs d’emploi.
A l’heure où chaque année 60 à 80 milliards d’euros échappent aux impôts à cause de l’évasion fiscale, le gouvernement ouvre la chasse aux fraudeurs parmi les pauvres.
A l’heure où Total annonce un bénéfice 2014 de 4,24 milliards d’euros et la Société Générale réalise 2,69 milliards d’euros de bénéfice en 2014, c’est sur les chômeurs – c’est-à-dire sur ceux qui sont exclus de ces bénéfices – que se porte la vindicte étatique.
A l’heure où chacun, et en premier lieu nos gouvernants, attend le retour magique d’une hypothétique croissance qui nous rendrait le plein emploi mais surtout l’accroissement des plus-values non partagées des produits du capital, les parias de l’emploi sont désignés comme responsables des abus commis dans notre système économique.
A l’heure où les agents de pôle emploi ne parviennent plus à faire face au raz de marée des trois millions six-cent mille chômeurs parce qu’ils sont en sous-effectif et soumis à des méthodes de management inadaptées à la difficulté de leur mission, il est décidé de recruter, non des agents supplémentaires pour améliorer les conditions d’accueil et d’accompagnement, mais des contrôleurs pour s’attaquer aux 1 à 2% de fraudeurs qui peupleraient les rangs des chômeurs.
Mais l’Etat fait le choix de recruter des contrôleurs !
Ce choix est grave parce qu’il participe à la désignation d’un bouc émissaire. Il laisse penser que tout chômeur est d’abord un fraudeur potentiel, ce qui induit l’idée que les chômeurs sont bien des assistés puisqu’ils cherchent à profiter du système.
Ce choix est honteux parce qu’il sème le doute et la division entre les plus exclus du jeu économique là où la solidarité serait à construire pour lutter contre ce système inique qui débarque chaque jour des charretées entières de travailleurs.
Ce choix est scandaleux parce qu’il ouvre la voie à toutes les discriminations, sans doute par veule facilité démagogique et stratégie électoraliste. Les assistés, tous les parias, seraient peut-être des individus sans foi ni loi qui tentent d’abuser de la confiance qui leur est faite en les faisant bénéficier d’une solidarité publique finalement indue. Le seul remède contre ces arnaqueurs serait de laisser chacun s’en sortir seul, sans assistanat et sans prélèvement social abusif sur les richesses produites qui plombent la performance de nos entreprises.
Non ! La voie de la répression, de la délation et du soupçon ne sortira pas notre société de la crise de civilisation qu’elle connaît et qui n’est pas une crise économique. A la crainte du gendarme, qui ne génère que peur et châtiment, nous opposons l’appel à la responsabilité et à la solidarité.
Être responsable, ce n’est pas être fautif. C’est être invité à s’inscrire dans un jeu social d’interdépendances où chacun assume sa part pour lui et pour les autres. Être solidaire c’est faire ensemble pour agir collectivement contre les problèmes et, surtout, pour s’en sortir ensemble et non les uns contre les autres.
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