Centres Educatifs Fermés : chassez le punitif il revient au galop !

Les gouvernements se suivent et rien ne change vraiment en matière de traitement des mineurs délinquants. Madame Taubira, ministre de la justice, a provoqué les foudres de l’opposition en esquissant seulement une question sur l’efficacité des Centres Educatifs Fermés (CEF). En conséquence, aucune réforme d’ampleur ne s’annonce. Les CEF sont bien installés dans le paysage judiciaire, même s’ils sont une ineptie. Aujourd’hui, les opposants – qui avaient tenté en vain d’élever la voix en 2002 lors de leur instauration – se font rares et ne parviennent pas à publier leurs analyses. Le « politiquement correct » s’impose à travers une doxa partagée à droite comme à gauche : la punition a une vertu en elle-même. Il n’est besoin d’aucune preuve pour justifier cette évidence ce qui permet de faire l’impasse sur toute analyse statistique des effets des politiques répressives qui, depuis quelques décennies, attaquent pièce après pièce l’ordonnance fondatrice du 2 février 1945. Non seulement il n’est besoin d’aucune justification mais toute position contraire est immédiatement invalidée sous l’accusation de « laxisme ».

Les membres du Conseil National de la Résistance étaient-ils à ce point laxistes qu’ils aient pu penser que l’éducation était la meilleure réponse à la délinquance des mineurs ? Ce serait leur faire un procès en naïveté qui ne tient pas compte du rapport des forces politiques en présence à la sortie de la seconde guerre mondiale. Il ne s’agissait pas d’une utopie béate mais d’un compromis construit entre des acteurs motivés par la seule nécessité de recréer au plus vite les conditions favorables d’une remise en ordre du pays, tant sur le plan politique qu’économique que pour le bien vivre ensemble.

Le recours à l’éducation repose en fait sur une conception humaniste très ancienne, profondément enracinée dans la culture de notre pays, culture judéo-chrétienne qui est aussi l’héritière de la pensée des lumières et des ruptures voulues par les révolutionnaires de 1789. La répression empêche, l’éducation permet. Ce clivage entre contrainte comportementale des individus et appel à la responsabilité des sujets traverse tous les débats sur l’éducation.

Le retour du répressif est ainsi à interpréter comme le symptôme d’une société qui a perdu le contact avec l’histoire des pensées qui la structurent, non comme la volonté de revenir à des fondamentaux qui ne sont que des mythes !

En matière de traitement de la délinquance, vouloir des résultats immédiatement mesurables et indiscutables, c’est avoir la prétention de faire pousser les plantes plus rapidement en tirant dessus. Cela permet de faire porter toute la responsabilité de ses actes au jeune, sans s’interroger sur les conditions socio-économiques de leur émergence.

Revenir au principe ancestral de l’éducation, c’est donner du temps au temps pour que le changement comportemental du jeune soit une véritable transformation individuelle et sociétale qui interroge toutes les dimensions : responsabilité personnelle et collective, conditions d’existence, etc.

Qu’on les analyse d’une manière ou d’un autre, les CEF répondent à une conception répressive et ne peuvent constituer des réponses adaptées au problème sociétal de la délinquance juvénile. C’est bien la logique punitive qu’il faut chasser ! En prenant les moyens qu’elle ne puisse revenir au galop.