Bientraitance dans les EHPAD

Un Etablissement d’Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes parisien a défrayé la chronique suite à de trop nombreux décès consécutifs à une épidémie de grippe vraisemblablement mal anticipée et traitée de manière non conforme aux procédures sanitaires en vigueur.

Ce regrettable incident intervient dans un secteur sensible : les personnes âgées. Paradoxalement, il manifeste un niveau élevé d’intolérance à l’égard de toute maltraitance institutionnelle à l’égard de « nos anciens ». Pourtant, le temps des hospices n’est pas si éloigné, ces mouroirs où croupissaient des personnes qui n’attendaient plus que la mort.

Que de chemin parcouru depuis le premier plan d’humanisation de ces établissements !

Le législateur s’est emparé du problème et, fidèle à son habitude de logorrhée réglementaire, a inondé les gestionnaires d’EHPAD de lois (2002-2, HPST, ASV…), de normes (PMS, HACCP, DASRI, ANAP[1]…), de recommandations de bonnes pratiques professionnelles concoctées par l’ANESM. Ces dernières, publiées depuis 2008 sont au nombre de 9 (!) : Repérage des déficiences sensorielles, Repérage du risque de perte d’autonomie ou de son aggravation, Prise en compte de la souffrance psychique de la personne âgée, Qualité de vie en Ehpad (4 recommandations), Evaluation interne pour les établissements de personnes âgées, Accompagnement des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer.

Cette inflation normative serait-elle significative d’un secteur particulièrement maltraitant qu’il faudrait « discipliner » ? Où concerne-t-il un public qui touche particulièrement la mansuétude du législateur ? Où recouvre-t-il des activités (soigner, prendre soin, nursing et cocooning) plus faciles à standardiser ? Où renvoi-t-il à la société les peurs de chacun d’une future et certaine dégradation mortelle ? Sans doute toutes ces causes se mêlent-elles pour justifier autant de sollicitude et d’indignation dès qu’il y a un dysfonctionnement.

Mais la bientraitance requiert-elle autant de précisions méticuleuses et pointillistes quant aux manières de faire là où c’est le bon sens et la sollicitude qui devraient être convoquées ? La bienveillance ne peut se réduire à des normes contraignantes qui sécurisent à bon compte une société de plus en plus policée. Ce n’est peut-être pas la rationalisation de leur vie qu’attendent les personnes âgées dépendantes. Finalement, l’effet contre-productif de l’épidémie de grippe, ce serait de produire de nouvelles normes et d’oublier que les habitants des EHPAD ont d’abord besoin de reconnaissance et de relations.

 

[1] Si vous voulez comprendre ces sigles, amusez vous a les chercher sur « Google »…