Absorption de l’Agence Nationale de l’Évaluation Sociale et Médico-sociale par la Haute Autorité de Santé

La loi de finances de la sécurité sociale pour 2018 a entériné, en son article 51, l’absorption de l’Agence Nationale de l’Evaluation Sociale et Médico-Sociale (Anesm) par la Haute Autorité de Santé (HAS).

Pour mémoire, l’Anesm a été créée suite à la loi 2002-2 pour développer l’évaluation dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESMS) et rédiger des recommandations de bonnes pratiques professionnelles (RBPP). La HAS, quant à elle a succédé à l’ANAES[1] pour assurer la certification des établissements de santé.

Dans un souci d’économies (un rapport d’un inspecteur général des finances avait, en 2014, dénoncé la gabegie des agences de l’État) et pour créer plus de fluidité entre le sanitaire et le médico-social, le gouvernement a donc décidé, malgré la levée de bouclier de la plupart des acteurs concernés et de leurs fédérations, de réunir en une seule structure les évaluations des deux secteurs. Quelles seront les conséquences de ce choix ?

Alors que les RBPP de l’Anesm se présentent comme un état des savoirs professionnels n’ayant pas de caractère opposable, les recommandations de la HAS sont totalement normatives. On peut s’interroger sur la fusion de ces deux approches… L’évaluation ne risque-t-elle pas de devenir une accréditation au regard de l’application conforme des recommandations ?

Alors que les évaluations internes mobilisent les équipes des ESMS et que les évaluations externes sont conduites par des consultants passant contrat avec les gestionnaires, la certification HAS est conduite par des experts. On peut s’interroger sur la cohabitation des deux dispositifs... L’évaluation ne risque-t-elle pas d’évoluer vers un audit piloté de l’extérieur ?

Alors que le fonctionnement de l’Anesm repose sur une large représentation des acteurs du champ social et médico-social notamment au sein de son Comité d’Orientation Stratégique, l’HAS est gouvernée par un collège où ne siègent que des représentants du monde sanitaire. On peut s’interroger sur ce que produira l’intégration de la première dans la seconde… Que deviendra l’évaluation sociale et médico-sociale si l’instance de gestion s’éloigne des acteurs de terrain ?

Alors que l’Anesm englobait tous les champs de l’action sociale et médico-sociale, la HAS, à l’instar des compétences déléguées au Agences Régionales de Santé (ARS) est centrée sur le sanitaire et, éventuellement, le champ voisin du médico-social. On peut s’interroger sur la manière dont sera pris en compte le secteur purement social dans ce contexte… L’évaluation ne risque-t-elle pas de se centrer, du fait des compétences de la HAS, sur les seuls domaines sanitaires et médico-sociaux, le social étant alors renvoyé aux services déconcentrés de l’État et aux départements ?

Bref, cette absorption risque de passer par pertes et profits le travail mené par l’Anesm depuis 10 ans et de démobiliser les équipes de terrain qui y ont largement contribué. Dommage !

 

[1] Agence Nationale de l’Accréditation en Santé