Nous devons tous nous mobiliser contre le coronavirus. Le site gouvernemental https://www.gouvernement.fr/info-coronavirus nous indique comment se transmet le Coronavirus et préconise « la distance sociale[1] » : « Pour tenir la maladie à distance, restez à plus d’un mètre de distance les uns des autres. »
Affirmer que la distance sociale est égale à un mètre, n’est-ce pas confondre deux registres, le social et le physique ? De quoi cette confusion serait-elle le signe ?
Distance physique ?
Se tenir à distance, physique, d’une personne contagieuse relève du bon sens et les consignes de l’OMS ou du gouvernement doivent être scrupuleusement respectées pour limiter le risque pandémique. Il s’agit alors de se tenir à l’écart, physique, d’autrui. La distance matérielle relève ici d’un choix, d’une culture ou, dans le cas présent, d’une consigne : chacun gradue son rapport physique à l’autre qui va de l’intime au public. En situation de confinement, on reste en proximité physique de ceux avec qui on vit chez soi (l’intime) et on met les distances avec ceux de l’extérieur (le public). Cela ne fait qu’exacerber la géographie physique des corps qui structure l’espace matériel de notre société de la sphère du privé jusqu’à l’espace public.
Distance sociale ?
Se tenir à distance sociale ne relève absolument pas de la même logique. Il est ici question des liens sociaux qui ne se traduisent pas en une valeur métrique ou en toute autre considération mesurable physiquement. Le fait que l’être humain vive en société ne résulte pas d’un choix, d’une culture ou d’une injonction. L’humain est un être social, il vivait en société avant même de s’humaniser. Les distances sociales dépendent quant à elles des cultures, du symbolique, des rapports sociaux et elles se graduent de soi à l’univers en passant par le couple, la famille, la communauté, la Nation… Il ne s’agit plus de « distances » mais de « proximités » plus ou moins fortes qui s’expriment par des espaces, des supports et des temps qui concrétisent la manière dont les femmes et les hommes font société ensemble. Il n’y a donc pas de distanciation sociale mais des lieux, des moyens et des moments singuliers pour vivre différemment les liens sociaux.
Proximité !
La distance physique ne crée pas de distanciation sociale ou, du moins, ne devrait pas en créer. Une mesure de protection circonstancielle et provisoire n’éradique pas nos appartenances, nos liens, nos affects, nos interdépendances qui font de chacun de nous un « animal social ».
En cette période de crise sanitaire, ne confondons pas les registres ! Faisons en sorte que la distance physique qui nous est imposée aujourd’hui nous aide à mieux saisir les proximités sociales que nous voudrons vivre après le confinement.
[1] L’Organisation Mondiale de la Santé parle, pour sa part, de distanciation sociale, concept élaboré lors de la grippe espagnole de 1918 et réactivé, en 2009, face à la pandémie du H1N1.
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